L’écriture thérapeutique, appelée également écriture expressive, possède des vertus qui ont été démontrées au travers de différentes études scientifiques. Nous nous attacherons ici à souligner quels sont les bienfaits qui peuvent être attendus de cette forme d’écriture, mais aussi à énoncer ses limites.
Les études scientifiques menées sur la santé
En effet, l’écriture expressive permet de se libérer de ses émotions, qui peuvent être tellement nuisibles pour la santé. Il est désormais communément admis que de nombreuses maladies ou pathologies relèvent du psychosomatique. Ainsi, certains traumatismes, comme les abus sexuels par exemple, peuvent engendrer des troubles de la santé des années durant. Par le biais de l’écriture, la libération des émotions et traumatismes peuvent impacter positivement la santé.
James W.Pennebaker a mené de nombreux travaux et analyses permettant de souligner les différents bénéfices, dont nous ferons ici une synthèse.
Les bienfaits de l'écriture démontrés
Impacts sur le système immunitaire et l’état de santé général
Au cours des années 80, Pennebaker réussit à souligner l’effet positif de l’écriture expressive sur le système immunitaire. Grâce à une étude menée sur cinquante étudiants, il parvint à démontrer, à l’appui de prises de sang mesurant le niveau de lymphocytes T (marqueur immunitaire important), l’impact de l’utilisation des écrits. En effet, il divisa le groupe en deux : d’une part, des étudiants auxquels on demandait d’écrire sur une expérience traumatique, durant 20 minutes pendant 4 jours. D’autre part, leurs camarades constituant le placébo se devaient d’écrire sur des sujets plus anodins. Les prises de sang, quant à elles, eurent lieu avant le premier écrit, à la fin de la dernière séance d’écriture puis six semaines plus tard. Les résultats furent sans appel : le système immunitaire des individus ayant partagé une expérience douloureuse fonctionnait mieux à la fin des séances d’écriture. De plus, cet effet persistait encore six semaines après cette expérience. Il a par ailleurs été observé que le nombre de consultations médicales était moindre pour le groupe ayant relaté des évènements douloureux. De façon plus qualitative, ces étudiants ont admis, pour 80% d’entre eux, mieux se connaitre grâce à cette expérience et en remarquer les bénéfices.
En 2002, Murray confirme les résultats à l’aide d’une nouvelle étude mesurant l’impact sur le système immunitaire.
En 2005, l’analyse de Baikie Et Wilhelm permet d’entrevoir les mêmes résultats : les séances d’écriture de 15 minutes durant 4 jours ont permis de souligner un effet notable sur l’amélioration de l’état de santé des participants, et ce jusqu’à 4 mois après l’exercice.
En 2016, Farooqui précise les maladies ou troubles mentaux pour lesquels l’écriture s’est révélée bénéfique : stress post-traumatique, anxiété, dépression, troubles obsessionnels compulsifs, chagrin et perte, maladies chroniques, addictions, troubles de l’alimentation, problèmes relationnels, problèmes de communication, estime de soi.
De plus, quelques études ont permis de mettre en lumière l’impact bénéfique de l’écriture sur le sommeil. Ainsi, l’évacuation de ses émotions et la prise de recul permis par cette pratique conduisent à un meilleur comblement des besoins physiologiques. L’endormissement est ainsi plus facile, le recours à la prise de médicaments moins fréquent, tout comme les insomnies. Cette amélioration de la qualité et de la quantité de sommeil ont un impact direct sur le système immunitaire, et donc sur l’état de santé en général.
Le cas des maladies chroniques
Impacts sur la tension et le cœur
Une petite étude menée sur un échantillon assez faible de patients (38 patients) a pu démontrer une baisse de tension artérielle, de façon modérée. Les résultats concernant cette pathologie restent donc à prendre avec prudence.
Une autre étude, menée sur des patients venant de réaliser un infarctus du myocarde, a été davantage encourageante : en effet, les individus ayant réalisé des exercices d’écriture lors desquels ils pouvaient exprimer leurs ressentis, se sont avérés en meilleure santé cinq mois plus tard. Ces derniers prenaient ainsi moins de médicaments et réalisaient moins de consultations médicales. De plus, leur tension avait diminué, ainsi que leurs symptômes cardiaques. Une seconde étude est venue renforcer ces conclusions, davantage du point de vue des patients, évoquant spontanément une meilleure qualité de vie, trois mois après avoir réalisé ces exercices.
Impacts sur l’asthme
En 2015, Helen Smith renforce les conclusions de la première analyse menée par Josh. En Grande-Bretagne, des asthmatiques suivis dans un centre spécialisé se sont adonnés à des séances d’écriture expressive. Ceux souffrant d’un asthme « modérément sévère » étaient parvenus à avoir des résultats nettement positifs. En revanche, cette méthode ne fut d’aucune utilité sur les asthmatiques légers ou les cas les plus sérieux.
Douleurs chroniques et polyarthrite rhumatoïde
Les différentes études menées sur la polyarthrite rhumatoïde ont permis de démontrer l’efficacité de la pratique de l’écriture sur la maladie. En effet, cette dernière conduisait à la réduction des symptômes, notamment pour les patients souffrant d’arthrite, témoignant d’une réduction de leur fatigue trois mois après la pratique des exercices. Le constat est néanmoins nuancé, une étude ultérieure menée par Mark Lumley modérant les bénéfices : en effet, cette amélioration ayant graduellement disparu quelques mois après la dernière séance d’écriture. Pour les patients atteints de fibromyalgie, une étude menée à l’université de Stony Brook a souligné des résultats particulièrement intéressants lorsque l’écriture se voyait combinée à des exercices favorisant une prise de conscience émotionnelle. Dans ce cas, la baisse de la douleur se faisait remarquer six mois après son utilisation. Concernant les troubles gastro-intestinaux, les résultats sont encourageants mais de plus amples études doivent être mises en œuvre pour confirmer ce constat.
Séropositivité
Le VIH étant un virus attaquant le système immunitaire, la pratique de l’écriture paraissait fort intéressante du fait des éléments cités plus haut. Keith Petrie, psychologue en Nouvelle Zélande, ainsi que O’Cleirigh ont respectivement réussi à démontrer que les séances d’écriture permettaient de diminuer la charge virale et d’améliorer le taux de survie des individus séropositifs. Exprimer ses sentiments et s’ouvrir émotionnellement permettent un meilleur traitement émotionnel et cognitif et un impact sur les indicateurs biologiques.
Accéder à une meilleure connaissance de soi
Enfin, écrire ses émotions, les coucher sur le papier, permet d’accéder à une meilleure connaissance de soi : la pratique va conduire l’individu à explorer ce qu’il a au plus profond de lui, lui permettant ainsi de verbaliser ses non-dits. L’écriture se voit dépourvue de tout jugement, il peut exprimer librement toutes ses pensées, mêmes les plus noires ou les moins admissibles en société. Cela permet également de déposer un fardeau, se délester de ses pensées obsessionnelles.
La compréhension de ses émotions permet une prise de recul sur les événements traumatisants vécus, engendrant la réduction de l’anxiété autour de ces expériences.
Les zones d'incertitude
Pour un certain nombre de maladies, et notamment les maladies chroniques, les bienfaits de l’écriture thérapeutique sont plus difficiles à démontrer. Les études menées sur ces sujets ne sont pas très nombreuses et des investigations plus poussées mériteraient d’être mises en œuvre pour en tirer de vraies conclusions. De plus, ces maladies résultent souvent de la combinaison de plusieurs facteurs (sociaux, environnementaux…) qui rendent difficiles d’y apporter une amélioration notable uniquement par la pratique de l’écriture.
Cancer
Bien que les résultats puissent paraitre prometteurs sur ce type de maladie, rien n’a été prouvé quant aux bienfaits de l’utilisation de l’écriture sur son évolution. En effet, les différentes études menées sur ce sujet ont conclu à des résultats contradictoires, ne nous permettant pas de tirer de conclusion pour le moment. Cependant, l’écriture peut indéniablement aider le patient à gérer son mal et accepter cette maladie. La méta-analyse menée par Stephen Lepore en 2004 permettait de conclure à une légère amélioration du bien-être pour certains cancers, en particulier le rein, la prostate et le sein. En 2014, Erin Merz confirme les résultats : l’écriture ne permettait pas forcément d’amélioration sur le plan médical. En revanche, elle permettait d’obtenir un meilleur sommeil et une meilleure gestion de la douleur. De plus, ces études ont souligné un bénéfice particulièrement intéressant lorsque le patient disposait d’un réseau social limité ne lui permettant guère de se confier et recevoir du soutien.
Diabète
Peu d’analyses ont été menées sur cette maladie. Aucune à ce jour n’a pu démontrer des résultats encourageants suite à l’utilisation de l’écriture thérapeutique.
Les troubles psychiatriques
Dépression
Peu d’études ont été menées sur le sujet pour parvenir à en tirer des conclusions fiables. Une des rares études a été réalisée par Katherine Krpan et a permis de souligner une amélioration du score de dépression pour les individus ayant effectué des exercices d’écriture. Néanmoins, il semble que cette pratique soit davantage bénéfique pour les personnes se sentant déprimées plutôt que pour celles ayant reçu un diagnostic de dépression clinique.
Stress post traumatique
Plusieurs études réalisées sur des stress post traumatiques de natures différentes ont permis de conclure à des résultats encourageants sur le mieux-être de l’individu grâce à l’utilisation de l’écriture. Cela a notamment été le cas dans une étude de Denise Sloan en 2021 sur les survivants à un accident de la route, puis sur des anciens combattants. Néanmoins, toutes les études sur le sujet ne semblent pas remporter le même succès. Ainsi, le profil des personnes concernées (âge, nature du stress, etc) semble influencer sur les résultats obtenus.
Troubles bipolaires et schizophrénie
La question reste à adresser sur cette population, bien que des témoignages indiquant un mieux-être avait été permis grâce à l’écriture, en dehors des phases psychotiques. Aucune étude n’a pour le moment été menée, du fait de la complexité de sa mise en œuvre, les phases dépressives, maniaques ou schizophréniques pouvant compromettre le travail d’analyse.
Quelles sont les personnes pour lesquelles écrire est le plus bénéfique ?
Un certain nombre d’études ont par ailleurs permis d’observer que le levier était davantage important pour les personnes ayant un cercle social restreint ou celles réticentes à se confier.
L’écriture joue un rôle de confident : parler de ses problèmes permet de les évacuer. Les personnes ayant pour habitude de faire part de leurs inquiétudes ou traumatismes à leur entourage réalisent déjà ce travail d’évacuation. L’écriture aura donc moins d’impact pour eux que pour les individus gardant leurs émotions.
Bon à savoir : il arrive régulièrement de ressentir un certain malaise dans les heures suivant les exercices d’écriture. Néanmoins, cet effet s’estompera rapidement, les personnes l’ayant expérimenté témoignant par la suite ressentir un mieux-être.
L’utilisation de l’écriture ne peut pas remplacer une prise en charge médicale adaptée. Elle peut néanmoins constituer une piste intéressante complémentaire pour l’accompagnement du patient.
Envie d’en savoir plus ou de vous lancer dans l’aventure ? Je suis Aurélie et je prête ma plume aux personnes voulant réaliser leur livre, ou simplement quelques écrits, pour se libérer à leur tour de leurs émotions. Pour me contacter, c’est par ici :
Sources :
- James W.Pennebaker « Ecrire pour se soigner – la science et la pratique de l’écriture expressive »
- Nayla Chidiac « Les bienfaits de l’écriture, les bienfaits des mots »